28

Ils étaient partis depuis six heures. Au début, le système de guidage avait connu deux ou trois défaillances par heure, mais depuis peu le trajet était doux comme une berceuse, avec seulement – parfois – une inclinaison ou un virage assez vertigineux. Ils avaient fait un déjeuner léger : des rations emballées dans des poches de papier métallisé, sans marquage, et qui se réchauffaient automatiquement quand on les ouvrait, ainsi que Floyd l’avait remarqué avec fascination et délices. Il avait exploré le microcosme des toilettes, avec son mécanisme étonnant de récupération des déchets organiques en apesanteur.

Auger lui demanda s’il avait le mal des transports, et il répondit par la négative.

— Tant mieux. Ça doit être tout ce temps que vous avez passé en mer. Bonne préparation au voyage dans les trous de ver, même si vous ne l’auriez sûrement pas imaginé à l’époque, dit-elle en se fourrant dans la bouche une gélule de couleur foncée.

— Vous vous sentez mal ? demanda-t-il.

— En dehors du fait que j’ai dans le corps une balle dont le robot pense qu’elle pourrait me tuer, non. Je ne me suis jamais sentie aussi bien de toute ma vie.

— Alors pourquoi cette pilule ?

— C’est une gélule de pan-AC. Pour « pan-affections/cures », précisa-t-elle, comme si ça expliquait tout. Ça guérit tout. Ça pourrait même vous maintenir en vie éternellement.

— Alors vous êtes immortelle ? demanda-t-il.

— Non, bien sûr que non, répondit Auger, comme si cette seule idée l’embarrassait. Si j’en prenais une tous les jours – ou toutes les semaines, enfin, je ne sais pas combien il faudrait en prendre pour ça –, je suppose que je le deviendrais. Jusqu’à ce qu’on vienne à en manquer, ou que j’attrape une maladie exotique si fascinante que même la pan-AC ne pourrait la soigner. Mais il n’y en aurait pas assez dans tout le système pour que j’en prenne tout le temps, et de toute façon mon environnement ne serait pas d’accord.

— Vous êtes contre les traitements qui rendent immortels ? demanda-t-il, un peu surpris.

— Ce n’est pas seulement ça. Les miens, les gens dont je suis proche – les EUPT, les États-Unis de ProxyTerre, si vous préférez, les Threshers ou ce que vous voudrez –, n’ont pas les moyens de fabriquer la pan-AC. Elle nous est fournie en quantité limitée par nos alliés modérés des États fédérés. Et c’est très coûteux.

— Vous n’avez pas essayé d’en fabriquer vous-même ?

Elle fit cracher une pan-AC au distributeur cylindrique et la montra à Floyd. C’était une simple gélule, guère plus impressionnante qu’un bouton arraché, ou un comprimé d’aspirine noir.

— Même si nous connaissions la recette, nous ne pourrions pas la fabriquer. La technologie intrinsèque à cette gélule est de celles que nous avons décidé de rejeter sauf en cas d’absolue nécessité, et les opérations à haut risque comme celle-ci rentrent dans cette catégorie. Ce qui est une sorte d’hypocrisie, je vous le concède.

Elle remit soigneusement la gélule dans son réceptacle.

— Que peut-il y avoir de si dangereux dans une technologie qui sert à fabriquer des pilules ?

— La technologie en question a des applications beaucoup plus vastes, répondit Auger. Ce n’est pas un simple cachet. Jamais comprimé n’a mieux mérité son nom : c’est un composé de milliards de minuscules machines, trop petites pour qu’on les voie même au microscope. Mais elles sont bien réelles, et il n’y a rien de plus dangereux au monde.

— Et pourtant elles ont le pouvoir de vous guérir…

— Quand on les avale, elles vont nager dans l’organisme ; elles sont assez intelligentes pour identifier ce qui ne va pas dedans, et elles ont le pouvoir d’y remédier. Le corps des Slashers grouille déjà de minuscules machines d’immortalité. Ils n’ont même pas besoin de pan-AC, puisqu’ils n’ont jamais rien qui cloche.

— Vous pourriez être comme ça ?

— Oui, si nous le voulions. Mais il y a longtemps il est arrivé quelque chose de moche qui nous a convaincus que les Slashers avaient tort, ou au moins qu’ils prenaient trop de risques, pour embrasser aveuglément cette technologie… Ça intégrait aussi la réalité virtuelle, l’ingénierie génétique radicale, le reformatage neural et la manipulation digitale des données. Nous avons rejeté tout ça. Nous avons mis en place une organisation quasi gouvernementale à haut niveau afin d’empêcher le développement de ces jouets mortels : le Comité du Seuil, ou Threshold, parce que nous voulons rester au seuil, sans jamais le franchir. Et c’est pour ça que les Slashers nous appellent les Threshers. Dans leur esprit, c’est une insulte, mais nous nous estimons très flattés de ce qualificatif.

— Cette mauvaise chose qui est arrivée…, dit Floyd. Qu’est-ce que c’était ?

— Nous avons détruit la Terre, répondit Auger.

— Vous avez détruit la Terre ?! Je ne vous suis plus, là.

— Nous n’avons pas la même histoire, vous et moi, Floyd. Après 1940, il n’y a rien de commun entre nos deux mondes.

— Que s’est-il passé de si important, en 1940 ?

— Rappelez-vous, c’est l’année où l’Allemagne a tenté d’envahir la France. Dans votre ligne temporelle, les forces d’invasion se sont arrêtées dans les Ardennes. L’aviation alliée les a bombardées, les enfouissant dans la boue. À la fin de l’année, la guerre était finie.

— Et dans votre… ligne à vous ?

— L’invasion a remporté un succès foudroyant. À la fin de 1940, il n’y avait plus beaucoup d’endroits en Europe et en Afrique du Nord que l’armée allemande n’avait pas occupés. Fin 1940, les Japonais s’étaient alliés aux nazis. Ils avaient lancé une attaque contre l’Amérique, faisant de toute l’affaire un conflit global. C’était l’état de guerre mécanisé à une échelle comme le monde n’en avait jamais connu. C’est ce que nous appelons la Seconde Guerre mondiale.

— Une deuxième guerre mondiale ?!

— Eh oui. Elle a duré jusqu’en 1945. Les Alliés ont gagné, mais à quel prix… À la fin de la guerre, le monde était un endroit radicalement différent. Nous avions laissé trop de génies sortir de trop de bouteilles.

— Comment ça ?

— Je ne sais même pas par où commencer, répondit Auger. Les Allemands avaient des fusées capables de bombarder Londres. Quelques dizaines d’années plus tard, la même technologie a permis d’envoyer des gens sur la Lune. Les Américains ont mis au point des armes nucléaires qui ont réduit à néant des villes japonaises en une seule frappe. En quelques dizaines d’années, ces bombes étaient devenues assez puissantes pour effacer plusieurs fois l’humanité entière en moins de temps qu’il ne vous en faut pour préparer le petit déjeuner. Et puis il y avait les ordinateurs. Vous avez vu la machine Enigma : ce genre de machine a joué un rôle significatif dans la cryptographie, pendant la guerre. Les Alliés se sont mis a construire des machines plus grosses, plus rapides, pour déchiffrer les messages Enigma. Au début, ces machines occupaient des pièces entières et consommaient assez d’énergie pour éclairer un immeuble de bureaux. Puis, très vite, elles sont devenues de plus en plus petites et rapides – beaucoup plus petites et beaucoup plus rapides. Elles se sont miniaturisées au point qu’on pouvait à peine les voir à l’œil nu. Les valves ont laissé la place aux transistors, les transistors aux circuits intégrés, les circuits intégrés aux microprocesseurs, les microprocesseurs aux processeurs optiques quantiques, et ainsi de suite. En l’espace de quelques dizaines d’années, il n’y avait plus aucun aspect de la vie qui n’ait été touché par les ordinateurs. Ils étaient partout, tellement omniprésents qu’on ne les remarquait même plus. Il y en avait chez nous, dans nos animaux, dans notre monnaie, et même dans notre organisme. Et ce n’était qu’un début. Au tournant du vingtième siècle, on ne se contentait pas d’avoir des très petites machines capables de traiter énormément de données très vite. Certains voulaient des très petites machines capables de traiter la matière elle-même : la déplacer, l’organiser et la réorganiser à une échelle microscopique.

— Je ne sais pas pourquoi, mais mon petit doigt me dit que ce n’était pas forcément une bonne chose, supputa Floyd.

— Eh non. Oh, l’idée était bonne, et les machines microscopiques étaient très utiles dans de nombreux domaines de la vie humaine. La pan-AC était du bon côté de l’équation. L’ennui, c’est que, quand on manipule ce qui est, fondamentalement, une nouvelle forme de vie, il n’y a tout simplement pas de place pour l’erreur.

— Et la nature humaine étant ce qu’elle est…

— Ça s’est passé fin juillet 2077, acquiesça Auger. Depuis quelques années, nous avions commencé à libérer des machines microscopiques dans l’environnement, afin d’essayer de réguler le climat. Depuis plus d’un siècle, depuis que nous avions commencé à polluer l’atmosphère, la planète se réchauffait. Les océans étaient foutus. Le niveau des mers avait monté, inondant les villes côtières et les cités. Il y avait des tempêtes monstrueuses. Certaines régions ont été prises par la glace pendant que d’autres se changeaient en fournaise. D’autres se contentaient de devenir… bizarres. Vraiment bizarres. C’est alors qu’une coalition de têtes de nœud a eu l’idée d’injecter de l’intelligence dans le système climatique. Ils appelaient ça « le temps intelligent »…

— Le temps intelligent, répéta Floyd en secouant la tête comme s’il n’en croyait pas ses oreilles.

— Ouais, on aurait dû l’appeler « le temps de la connerie », plutôt. Ça allait régler tous nos problèmes. Un temps qu’on pouvait allumer et éteindre, programmer en fonction de ses desiderata. Nous avons ensemencé les océans et la stratosphère avec de minuscules machines volantes invisibles à l’œil nu, inoffensives pour l’homme. Des quantités phénoménales de machines autoréplicantes, qui s’amélioraient et se régulaient d’elles-mêmes. Qui réfléchissaient les radiations ici, les absorbaient là ; refroidissaient tel endroit, réchauffaient tel autre ; créaient des nuages ou les faisaient se disperser selon des schémas géométriques, comme dans un tableau de Dali, déviaient radicalement les courants océaniques profonds, les faisaient s’entrecroiser, comme la circulation aux heures de pointe. On avait même réussi à le commercialiser ! On savait inscrire des logos de plusieurs milliers de kilomètres d’envergure sur l’océan Pacifique avec du phytoplancton. Ou modifier les couleurs du coucher de soleil que vous voyiez depuis votre île privée. « Un peu plus de vert, ce soir, monsieur ? Pas de problème. » Pendant un moment, ça a marché. Le climat s’est stabilisé et a commencé à revenir aux conditions d’avant 2020. Les calottes polaires ont recommencé à augmenter, les déserts à reculer et les points chauds à se refroidir. Les gens sont revenus habiter des villes qu’ils avaient abandonnées vingt ans plus tôt.

— Vous allez dire que j’ai mauvais esprit, dit Floyd, mais je sens venir un « mais »…

— Ça s’est foutrement mal terminé. À la fin de 2076, il y a eu des rumeurs, des rapports non confirmés selon lesquels certains schémas climatiques n’obéissaient pas aux instructions : des courants océaniques que personne ne pouvait infléchir, des nuages qui ne voulaient pas se disperser, quoi qu’on fasse. Un symbole obscène persistant, au large de la baie de Biscayne, dut être effacé de toutes les images satellites. On ne voulait pas l’admettre officiellement, mais il était clair que certaines nanomachines avaient un peu trop évolué. Elles étaient plus soucieuses de leur propre préservation que d’obéir à des instructions de fermeture et de désassemblage séquencées. Et vous savez ce que notre coalition de têtes de nœud a fait pour tout arranger ?

« Ils ont inventé des machines encore plus intelligentes, plus affûtées, censées éradiquer la première vague. Et ils ont reçu l’autorisation de les injecter dans l’environnement. Mais loin d’arranger les choses, ça les a fait empirer. Des problèmes initiaux, à les entendre. Sauf que les événements climatiques qui échappaient à tout contrôle étaient plus terrifiants d’heure en heure, bien pires que tous ceux qu’on avait eu à gérer jusque-là. À ce moment-là, le temps était mécanisé. En 2077, huit couches de technologie avaient été lancées dans la bataille, et la situation ne s’était pas améliorée. Il y avait tout de même eu un signe encourageant : au début du mois de juillet de cette année-là, le symbole obscène s’était effacé. Tout le monde était très excité. On disait qu’on avait réussi à inverser la tendance, que les machines avaient commencé à revenir sous contrôle humain. Et tout le monde de pousser un immense soupir de soulagement.

— Je suppose qu’ils s’étaient réjouis trop vite.

— Le phytoplancton dont la floraison composait le symbole obscène avait disparu parce que les machines l’avaient dévoré. Elles avaient commencé à se nourrir d’organismes vivants. Ça allait à l’encontre des structures les plus fondamentales intégrées à leur programmation – elles n’étaient pas censées nuire aux êtres vivants – mais il n’y avait rien à faire. Et la situation a dégénéré très vite. Après le plancton, elles ont remonté la chaîne alimentaire marine. À la mi-juillet, il ne restait pas grand-chose de vivant dans tout l’océan Atlantique. Il n’y avait plus que des machines. Le 20 du mois, les machines avaient commencé à attaquer les organismes basés sur la terre ferme. Le 27, les machines avaient digéré l’humanité. Ça s’était passé très vite. Si vite que c’était presque comique. On aurait dit la Peste Noire dirigée par Buster Keaton. Le 28, il ne restait plus d’organismes vivants à la surface de la Terre, en dehors de quelques bactéries extrémophiles enfouies dans les profondeurs du sol.

— Il y a forcément eu des survivants, dit Floyd. Sinon, vous ne seriez pas là à me raconter tout ça.

— Quelques individus ont réussi à s’en sortir, convint Auger. Les gens qui avaient déjà quitté la Terre et s’étaient installés dans des habitats et des colonies en orbite. Des installations primitives, de bric et de broc, à peine autosuffisantes, mais qui leur permirent de survivre le temps de surmonter la perte de la Terre, et le traumatisme psychique écrasant qui l’accompagnait. C’est à peu près à ce moment-là que nous nous sommes divisés en deux groupes politiques. Pour les miens, les Threshers, il faut empêcher à tout prix qu’une catastrophe pareille puisse se reproduire, et c’est pourquoi nous avons rejeté la nanotechnologie qui avait conduit à l’élaboration des machines – et de bien d’autres choses. De l’autre côté, les Slashers pensaient que les dégâts étaient faits et qu’il n’y avait plus de raison de se limiter, comme sous l’effet d’un sentiment de culpabilité mal placé.

Floyd resta un instant silencieux. Il s’efforçait d’intégrer tout ce qu’Auger venait de lui révéler.

— Mais vous m’avez dit que vous veniez de l’an 2200 et quelques, finit-il par dire. Si tout ça s’est passé au milieu du vingt et unième siècle, il y a tout un pan d’histoire que vous ne m’avez pas raconté…

— Deux cents ans d’histoire, confirma Auger. Je vous fais grâce des détails. En réalité, il ne s’est pas passé grand-chose. Les mêmes courants politiques existent toujours. Nous contrôlons l’accès à la Terre, et les Slashers contrôlent l’accès au reste de la galaxie. La plupart du temps, la situation était relativement paisible. Nous avions quelques petits… différends. Les Slashers n’ont pas cessé d’essayer de réparer la Terre, avec ou sans notre accord. Jusque-là, ils n’ont fait qu’aggraver la situation. Il y a toute une écologie de machines là-bas, maintenant. La dernière fois qu’ils ont essayé – il y a vingt-trois ans –, nous avons eu une petite guerre concernant les droits d’accès. Ça a mal tourné, c’est même devenu vraiment moche – mais nous nous sommes rabibochés par la suite. C’est vraiment dommage pour Mars, mais bon…

— C’est bien de voir qu’il y a des choses qui ne se démodent pas… les guerres par exemple, dit Floyd.

Auger hocha tristement la tête.

— Mais au cours des derniers mois les relations se sont à nouveau envenimées. C’est pour ça que je n’ai pas été spécialement ravie de découvrir une présence slasher chez vous, à Paris. J’en déduis qu’ils mijotent quelque chose, et ça m’inquiète.

— Attendez, dit Floyd. Je voudrais tirer ça au clair tout de suite. Il y a quelques heures, vous m’avez dit que vous n’étiez pas une voyageuse dans le temps…

— C’est vrai, dit Auger, sentant son visage se figer.

— Mais vous n’arrêtez pas de me dire que vous venez du futur, que vous êtes née en 2200… je ne sais plus combien. Vous m’avez même parlé de certains événements qui se sont produits entre mon époque et la vôtre : le temps qui est devenu dingue, les machines qui se sont mises à débloquer, les gens qui vivaient dans l’espace…

— Oui, fit Auger, le sourcil haussé.

— Vous avez donc fait des allers et retours entre le présent et l’avenir. Pourquoi prétendre le contraire ? Ce vaisseau doit être votre machine à remonter le temps, ou je ne sais comment vous l’appelez. Vous m’emmenez dans l’avenir, c’est ça ?

Elle braqua sur lui un regard implacable.

— En quelle année sommes-nous, Floyd ?

— En 1959, dit-il.

— Non, dit-elle. Ce n’est pas vrai. On est en 2266 – plus de trois cents ans dans ce que vous pensez être l’avenir.

— Vous voulez dire qu’on sera en 2266 quand on ressortira à l’autre bout de ce… de ça… Ou bien est-ce qu’on est déjà dans l’avenir ?

— Non, ce n’est pas ça, dit-elle avec une patience infinie, inquiétante. On n’est pas en 1959 maintenant. On n’était pas en 1959 hier, et on n’était pas en 1959 quand on s’est rencontrés, la semaine dernière.

— Ça, c’est encore plus incompréhensible que tout le reste.

— Je dis que toute votre existence est… comment dire ? Ce n’est pas ce que vous croyez. À un certain niveau, il est même inexact de dire que vous êtes Wendell Floyd.

— Le robot aurait peut-être dû vous faire dormir, tout compte fait. Vous me paraissez fiévreuse…

— Je voudrais bien que ce soit la fièvre. Ça rendrait la vie beaucoup plus facile pour tout le monde.

— Et pour moi donc ! dit Floyd en grattouillant le pansement qu’il avait autour de la tête.

Il commençait à se demander si ce n’était pas lui qui avait des hallucinations. Son bras flottait en apesanteur. Comme s’ils tombaient en chute libre, ou comme dans un rêve. Il allait se réveiller dans sa chambre de la rue du Dragon et rire de tout ça avec Custine en buvant un peu de leur mauvais café pour faire descendre des toasts brûlés. Une bosse de trop sur la tête, c’était ça, le problème.

Sauf qu’il n’arrêtait pas de ne pas se réveiller.

— Eh bien, commençons par moi, dit-il. Repartons du pauvre couillon appelé Wendell Floyd. Expliquez-moi comment il se pourrait que je ne sois même pas celui que je crois être.

— Wendell Floyd est mort, dit Auger. Il est mort il y a des centaines d’ann…

Une sirène d’alarme retentit quelque part dans la cabine. Floyd tendit la main vers la manette, prêt à ramener le vaisseau sur sa trajectoire, mais Auger secoua la tête et leva trois doigts en signe d’avertissement.

— C’est autre chose, dit-elle. Le système de guidage est toujours opérationnel.

— Alors, quel est le problème ?

— Je ne sais pas très bien. Ils ne m’ont enseigné que les rudiments du pilotage de cet engin.

Auger actionna plusieurs rangées d’interrupteurs, modifiant l’affichage des données et des diagrammes qui défilaient sur les écrans. Mais elle eut beau faire, elle ne put couper l’alarme.

— Je ne pense pas que le problème vienne du module, dit-elle. Tout a l’air à peu près OK sur tous les tableaux. Et rien n’indique que ça ait un rapport avec la géométrie du tunnel devant nous.

Elle fit basculer d’autres interrupteurs, tapota l’un des écrans avec l’ongle de son index, fronça les sourcils devant l’avalanche de minuscules chiffres et lettres.

— Ce n’est pas bon, dit-elle. Pas bon du tout.

— Dites-moi ce qu’il y a, fit Floyd d’une voix tendue.

— On dirait que quelque chose arrive derrière nous. C’est ce que cette alarme nous dit, en tout cas. Le système de proximité capte une sorte d’écho par l’arrière. Je n’arrive pas à déchiffrer les données, mais ça pourrait être un autre module.

— Comment serait-ce possible ?

— Ça, je voudrais bien le savoir, croyez-moi. Même si c’était mathématiquement possible, ce que je ne crois pas, le sphincter est hermétiquement fermé à l’entrée de Paris. Il n’y avait pas d’autre module dans la bulle de récupération de T2. Et donc ce n’est pas possible. Nous devrions être le seul rat dans ce labyrinthe.

— Alors, quoi d’autre ? Un second appareil, mais pas forcément un module ?

— Je ne sais pas. Peut-être des débris que nous avons largués derrière nous. L’insertion a été mouvementée, et il est probable que des fragments ont été arrachés au vaisseau. Il se peut que ça nous suive, que ce soit aspiré dans notre sillage. Si nous avons un sillage.

— Mais dans ce cas pourquoi ne l’avons-nous pas vu avant ?

— Ça, c’est une rudement bonne question, dit-elle tout bas, mais je ne sais pas si on pourra en dire autant de la réponse.

La pluie du siècle
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